Lois sur le blasphème au Nigeria / Élections au Niger / Suite du mouvement #EndSars au Nigeria / Amnistie du chef de gang à l'origine de l'enlèvement des 300 écoliers au Nigeria ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏ ͏
 
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VEILLE PHAROS / SAHEL : Nigeria - Niger
12 février 2021
 
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La question de l’application de lois contre le blasphème au Nigeria est revenue dans le cœur des débats dans l’actualité de cette semaine. L’année dernière, un tribunal appliquant la charia a condamné à mort un musicien musulman de 22 ans pour avoir blasphémé dans des messages privés sur WhatsApp. Son cas doit être réexaminé dans un nouveau procès. Les affaires juridiques liées à l’application de la charia sont régulièrement critiquées par les organisations de défense des droits humains.

Dans le reste de l’actualité, l’Église catholique nigériane a réaffirmé qu’elle ne paierait pas de rançons en cas d’enlèvement de membres de l’Église. Par ailleurs, les quatre principaux chefs militaires de l’armée nigériane viennent d’être remplacés par le Président Buhari. Le chef d’état-major des armées, Tukur Buratai, était vivement critiqué, notamment à la suite des manifestations #EndSars contre les violences policières, au cours desquelles l’armée a tué de nombreux manifestants.

Au Niger, la CENI a validé la qualification de Bazoum et d’Ousmane au second tour. Les tractations politiques sont nombreuses dans l’entre-deux tours, alors que la CENI a promis d’être plus vigilante en raison de certaines fraudes signalées au premier tour.


The issue of the enforcement of blasphemy laws in Nigeria has returned to the forefront of this week's news. Last year, a Sharia court sentenced a 22-year-old Muslim musician to death for blasphemy in private messages on Whatsapp. His case is to be reviewed in a new trial. Legal cases related to the application of Shari'a are regularly criticised by human rights organisations.

In other news, the Nigerian Catholic Church has reiterated that it will not pay ransoms in cases of kidnapping of church members. In addition, the four main military commanders of the Nigerian army have just been replaced by President Buhari. The army chief of staff, Tukur Buratai, was strongly criticised, particularly following the #EndSars demonstrations against police brutality, during which the army killed several demonstrators.

In Niger, the INEC validated the qualification of Bazoum and Ousmane in the second round. Political dealings are numerous in between the two rounds, while INEC promised to be more vigilant because of some frauds reported in the first round.

 
 

L'info phare - Source médiatique

 
 

Au Nigeria, les lois sur le blasphème constituent une entrave à la liberté

Malgré sa diversité religieuse, la liberté religieuse est entravée au Nigeria.  Au niveau local, la charia est appliquée dans douze États du nord du pays depuis 1999. Afin de respecter la Constitution nationale qui protège la liberté de religion et de croyances, les codes pénaux de la charia ne s’appliquent pas aux non-musulmans, et excluent les dispositions contre l’apostasie. Cependant, les condamnations pour blasphème sont préoccupantes, notamment dans l’État de Kano. L’année dernière, un tribunal appliquant la charia a condamné à mort un musicien musulman de 22 ans pour avoir composé une chanson blasphématoire dans des messages privés sur WhatsApp. Son cas doit être réexaminé dans un nouveau procès. En avril 2020, la police a arrêté l’activiste athée Moubarak Bala pour avoir prétendument insulté le prophète Mahomet dans un message sur Facebook. Il est toujours détenu malgré une ordonnance de la cour du 21 décembre demandant sa libération.

Nigeria's blasphemy laws are an impediment to liberty

Despite its religious diversity, religious freedom is impeded in Nigeria.  At the local level, Shari’a law has been enforced in 12 northern states since 1999. In order to comply with the national Constitution, which protects freedom of religion and belief; Shari’a penal codes do not apply to non-Muslims and exclude provisions against apostasy. However, convictions for blasphemy are a concern, particularly in the state of Kano. Last year, a Shari’a court sentenced a 22-year-old Muslim gospel musician to death for blasphemy in private messages on WhatsApp. His case is to be reviewed in a new trial. In April 2020 police arrested atheist activist Mubarak Bala for allegedly insulting the Prophet Muhammad in a Facebook post. He is still detained despite a court order of 21 December calling for his release.

 
 

Source médiatique

 
 

L’Église catholique annonce qu’elle ne payera pas pour les enlèvements religieux au Nigeria

Dans un entretien accordé à la fondation « Aide à l’Eglise en détresse », Mgr Ignatius Ayau Kaigama, archevêque d’Abuja, a réitéré le refus de payer les rançons pour les enlèvements des prêtres et des religieux.  Cette déclaration survient alors que l’on constate une recrudescence de cette pratique en Afrique de l’Ouest. Le 15 janvier, le père John Gbakaa, prêtre du diocèse de Minna, dans l’État fédéré du Niger, a été retrouvé mort quelques heures après son enlèvement.  Les ravisseurs l’avaient mis à mort après avoir demandé une rançon et tenté de négocier avec son diocèse. Le refus de payer les rançons des prêtres et des religieux confirme la position de l’Église catholique, en particulier au Nigeria. Selon Mgr Ignatius Ayau Kaigama, « payer une rançon, c’est mettre chaque personne en danger ».

The Catholic Church announces it will not pay for religious abductions in Nigeria 

In an interview with the foundation "Aid to the Church in Need", Archbishop Ignatius Ayau Kaigama of Abuja reiterated the refusal to pay ransoms for the kidnapping of priests and religious.  This statement comes at a time when there is a resurgence of this practice in West Africa. On 15 January, Father John Gbakaa, a priest from the diocese of Minna in the Federated State of Niger, was found dead a few hours after his abduction.  The kidnappers had put him to death after asking for ransom and attempting to negotiate with his diocese. The refusal to pay the ransoms of priests and religious confirms the position of the Catholic Church, particularly in Nigeria. According to Bishop Ignatius Ayau Kaigama, "to pay ransom is to put every person in danger".

 
 

Les quatre principaux chefs militaires remplacés au Nigeria

Le 26 janvier, le Président nigérian Muhamadu Buhari a remplacé les principaux chefs de l'armée nigériane. Le chef d’état-major de la Défense, l’armée de terre, la marine et l’armée de l’air ont tous les quatre changé de chef. Ceux-ci étaient en place depuis l’élection de Buhari en 2015, une longévité inédite à ce niveau. Parmi ces sortants, Tukur Buratai, ancien chef d’état-major, était la figure la plus contestée, notamment pour avoir clamé à tort et à plusieurs reprises la victoire contre Boko Haram. Par ailleurs, la responsabilité de Tukur Buratai en tant que chef de l'armée était pointée du doigt lors de tirs contre des civils sur le péage de Lekki à Lagos lors des manifestations pacifiques contre l'unité de police SARS (Special Anti-Robbery Squad).

Nigeria's four top military leaders replaced

On 26 January, Nigerian President Muhamadu Buhari replaced the main leaders of the Nigerian army. The chief of defence staff, the army, navy and air force have all 4 changed their chiefs. These had been in place since Buhari's election in 2015, an unprecedented longevity at this level. Among these incumbents, Tukur Buratai, former chief of staff, was the most contested figure, notably for having wrongly claimed victory over Boko Haram on several occasions. Furthermore, his responsibility for Tukur Buratai as army chief was pointed out during the shooting of civilians at the Lekki tollgate in Lagos during peaceful demonstrations against the SARS (Special Anti-Robbery Squad) police unit.

 
 

Des paysans remportent un procès contre Shell au Nigeria

La justice néerlandaise a condamné, vendredi 29 janvier, en appel Shell à verser des indemnisations à quatre fermiers nigérians, qui accusaient l’entreprise de fuites de pétrole ayant détruit trois villages. Le tribunal a jugé que la filiale du géant pétrolier au Nigeria était bien responsable des déversements dans deux des localités concernées. Quatre fermiers et pêcheurs du sud-est du Nigeria étaient en procédure judiciaire depuis 13 ans contre le géant pétrolier Shell, le plus gros producteur de pétrole en Afrique avec deux millions de barils exportés chaque jour.  Les plaignants, dont deux sont décédés depuis le début de cette bataille judiciaire, réclamaient également que Shell nettoie les dégâts dans leurs villages de Goi, Ikot Ada Udo et Oruma.

Farmers win lawsuit against Shell in Nigeria

On Friday 29 January, the Dutch court ordered Shell to pay compensation to four Nigerian farmers who accused the company of oil leaks that destroyed three villages. The court ruled that the oil giant's subsidiary in Nigeria was indeed responsible for the spills in two of the affected localities. Four farmers and fishermen in south-eastern Nigeria had been in court proceedings for 13 years against the oil giant Shell, Africa's biggest oil producer with 2 million barrels exported every day.  The plaintiffs, two of whom have died since the start of the legal battle, were also demanding that Shell clean up the damage in their villages of Goi, Ikot Ada Udo and Oruma.

 
 

De nombreuses tractations au Niger en vue du second tour entre Bazoum et Ousmane.

Au Niger, la Cour constitutionnelle a annoncé les résultats définitifs du premier tour de la présidentielle, officialisant l’opposition entre Mohamed Bazoum, du parti présidentiel PNDS Tarayya, et Mahamane Ousmane, du RDR Tchanji au second tour prévu le 21 février. Les tractations politiques en vue du second tour sont nombreuses. Deux partis ont déjà annoncé leur soutien à Mohamed Bazoum, alors que Mahamane Ousmane est lui déjà soutenu par la coalition Cap 20/21 qui regroupe dix-huit partis. Selon certains observateurs, les alliances de l’entre-deux tour ne suffiront cependant pas à combler l’écart de voix entre Bazoum (39% des voix) et Ousmane (près de 17%).

Numerous negotiations in Niger in preparation for the second round between Bazoum and Ousmane.

In Niger, the Constitutional Court has announced the final results of the first round of the presidential election, formalizing the opposition between Mohamed Bazoum of the presidential party PNDS Tarayya and Mahamane Ousmane of the RDR Tchanji in the second round scheduled for 21 February. The political negotiations for the second round are numerous. Two parties have already announced their support for Mohamed Bazoum, while Mahamane Ousmane is already supported by the Cap 20/21 coalition of 18 parties. According to some observers, the alliances between the two rounds will not, however, suffice to bridge the gap between Bazoum (39% of votes) and Ousmane (nearly 17%).

 
 

Amnistie d’un chef de gang à l’origine du kidnapping de plus de 300 écoliers au Nigeria

La reddition du chef de gang Awwalun Daudawa et de cinq de ses lieutenants a été largement médiatisée par les autorités de l’État de Zamfara.  Il était l’un des trois chefs à l’origine de l’enlèvement de 344 écoliers le 11 décembre dernier dans le nord-ouest du pays. Les bandits ont rendu armes et munitions, et ont juré sur le Coran de ne jamais revenir à ces pratiques en échange d’une amnistie. Depuis plusieurs mois, le gouverneur de l’État de Zamfara mène des négociations avec les groupes criminels locaux, ce qui a, selon lui, permis de réduire les attaques et les nombres de morts dans son État. Cette volonté de négocier avec les groupes criminels du nord-ouest n’est cependant pas partagée par tous les États, le gouverneur de Kaduna ayant récemment déclaré ne pas croire à la repentance de ces groupes criminels. Le gouverneur de l’État de Katsina voisin, se montre quant à lui ouvert aux négociations, avec le soutien de leaders religieux locaux.

Amnesty of a gang leader responsible for the kidnapping of more than 300 schoolchildren in Nigeria

The surrender of gang leader Awwalun Daudawa and five of his lieutenants was widely publicised by Zamfara state authorities.  He was one of the three leaders behind the abduction of 344 schoolchildren on 11 December in the north-west of the country. The bandits surrendered arms and ammunition and swore on the Koran that they would never return to these practices in exchange for an amnesty. For several months now, the governor of Zamfara State has been conducting negotiations with local criminal groups, which he says has led to a reduction in attacks and death tolls in his state. However, this willingness to negotiate with criminal groups in the north-west is not shared by all states, as the governor of Kaduna has recently stated that he does not believe in the repentance of these criminal groups. The governor of the neighbouring state of Katsina, for his part, is open to negotiations, with the support of local religious leaders.

 
 

Au Nigeria, le mouvement social dans la continuité de #EndSars se poursuit

Afin de réclamer la justice, plusieurs figures du mouvement contre les violences policières qui a balayé le Nigeria en octobre appellent à occuper samedi un péage à Lagos, où l'armée avait réprimé dans le sang une manifestation. Selon Amnesty International, le 20 octobre, l’armée avait tué au moins dix personnes au péage de Lekki, à Lagos. Il s’agissait de la contestation #EndSars contre les brutalités policières au Nigeria, ayant fait au moins 56 morts selon Amnesty International. La Cour de justice mise en place par l’État de Lagos pour enquêter sur la répression des manifestations a autorisé, ce samedi 6 février la compagnie en charge du péage à reprendre possession des lieux. La reprise de l’exploitation commerciale du péage est perçue comme un affront par de nombreux activistes, alors que les responsables de la tuerie du péage de Lekki n’ont pas encore été jugés.

In Nigeria, the social movement in the continuity of #EndSars is continuing.

In order to demand justice, several figures in the movement against police violence that swept Nigeria in October are calling to occupy a tollgate in Lagos on Saturday, where the army had bloodily repressed a demonstration. According to Amnesty International, on 20 October, the army had killed at least 10 people at the Lekki tollgate in Lagos. This was the #EndSars protest against police brutality in Nigeria, which has left at least 56 dead, according to Amnesty International. The Court of Justice set up by Lagos State to investigate the repression of the protests authorized Saturday 6 the company in charge of the toll to retake possession of the premises. The resumption of the commercial operation of the toll is seen as an affront by many activists, while those responsible for the killing of Lekki toll has not been judged yet.

 
 

L’armée nigériane récupère des camps djihadistes de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest

Selon deux sources militaires, les soldats nigérians, appuyés par des frappes aériennes, se sont récemment emparés de plusieurs camps de djihadistes affiliés à l’État islamique dans le nord-est du Nigeria, en proie à une insurrection depuis 2009. Ces camps, situés à la frontière entre les États de Yobe et du Borno, ont été repris au groupe État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP) dans le cadre d’une opération militaire lancée il y a un mois. Ces dernières années Iswap a infligé de lourdes défaites à l’armée nigériane, très critiquée pour son incapacité à mettre fin au conflit. Le groupe cible particulièrement les militaires et a tissé des liens économiques avec les populations locales, même si les attaques contre des civils semblent s’être multipliées ces derniers mois.

Nigerian army recovers from Islamic state jihadist camps in West Africa

According to two military sources, Nigerian soldiers, backed by air strikes, have recently seized several camps of jihadists affiliated to the Islamic state in north-eastern Nigeria, which has been in the grip of an insurgency since 2009. The camps, located on the border between Yobe and Borno states, were taken over from the Islamic State in West Africa (Iswap) group as part of a military operation launched a month ago. In recent years Iswap has inflicted heavy defeats on the Nigerian army, which has been widely criticised for its inability to end the conflict. The group targets the military in particular and has developed economic ties with the local population, although attacks on civilians seem to have increased in recent months.

 
 

La CENI s’engage à être plus vigilante contre les fraudes pour le second tour de l’élection au Niger

La Commission Électorale Nationale indépendante (CENI) s’est engagée, avec la caution de l’armée, à corriger certaines insuffisances du processus électoral d’ici le deuxième tour de l’élection présidentielle au Niger, le 21 février. Des échanges ont été organisés pendant deux jours afin d’évaluer les élections locales, législatives et du premier tour des présidentielles en novembre dernier. La présence de l’armée comme garantie du bon déroulement du scrutin a notamment été avancée. Des fraudes ont surtout été constatées dans les zones les plus reculées du pays, notamment au moment du dépouillement et de la transmission des résultats.

NIEC pledges to be more vigilant against fraud for the second round of elections in Niger

The National Independent Electoral Commission (NIEC) has pledged, with the backing of the army, to correct some shortcomings in the electoral process between now and the second round of Niger's presidential election on 21 February. Exchanges were held over two days to evaluate the local, legislative and first round presidential elections last November. The presence of the army as a guarantee of the smooth running of the elections was notably put forward. Fraud was especially noted in the most remote areas of the country, especially during the counting and transmission of results.

 
 
 
 
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Ce bulletin de veille est réalisé par l’Observatoire Pharos, observatoire du pluralisme des cultures et des religions, dans le cadre de son projet d'action au Niger, Nigeria, Burkina Faso et Mali. Il rassemble des informations, analyses et déclarations qui ne reflètent pas systématiquement la perception de la situation par l’Observatoire Pharos, mais qui constituent des documents à intégrer dans l’analyse. Les destinataires, partenaires de l’Observatoire Pharos, sont invités à contribuer à la qualité de cette veille par le partage de toutes informations utiles et diffusables.

This newsletter is written by Pharos Observatory, an observatory of cultural and religious pluralism, as part of its project in Niger, Nigeria, Burkina Faso and Mali. It gathers information, analyses and speeches which may not reflect Pharos Observatory's feeling about the situation, but which should be taken into account as part of the analysis. All recipients, who are Pharos Observatory partners, are encouraged to contribute to this Watch by sharing any information that is worthwhile and fit to print.

 
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